Si j’étais la gauche… Estossi l’esquèrra…

A propos d’une découverte anatomique récente : le nombril est à gauche…pas le cœur.

Pertocant ua descobèrta anatomica recenta : lo melic qu’ei a l’esquèrra…pas lo còr

Photo leuren.t wikimédia commons

Si j’étais la gauche, je prendrais la mesure du spectacle que je suis en train de donner.

Estossi l’esquèrra, que prenerí la pagèra de l’espectacle que soi a dar.

Je me demanderais s’il est vraiment bien raisonnable de laisser croire qu’il existe l’homme providentiel ou la femme providentielle.

Que’m demandarí s’ei vertadèrament rasonable de deishar créder qu’existeish la hemna o l’òmi providenciau

Je me demanderais si le problème est vraiment que se présente l’un, l’une ou l’autre à l’élection présidentielle.

Que’m demandarí se la question ei vertadèrament que’s presenti l’un o l’auta a l’eleccion presidenciau

Je me demanderais si la démocratie est un jeu de poupées russes, c’est à dire une succession d’élections, de primaires de primaires, pour en arriver à une primaire et enfin à la désignation d’un candidat ou d’une candidate.

Que’m demandarí se la democracia ei un jòc de monacas russas, çò qui vòu díser ua seguida d’eleccions, de primàrias de primàrias, entà n’arribar a ua primària e enfin a la designacion d’ua candidata o d’un candidat.

Je me demanderais si la démocratie c’est d’en arriver à la désignation d’un candidat ou d’une candidate à une élection qui n’est rien d’autre que le renforcement d’un pouvoir personnel démesuré.

Que’m demandarí se la democracia ei de n’arribar a la designacion d’un candidat o d’ua candidat per ua eleccion qui n’ei pas arren mei que de con.hortar un poder personau desmesurat.

Je me demanderais ce qu’est la gauche.

Que demandarí çò qu’ei l’esquèrra.

Je me demanderais ce qu’est un programme de gauche.

Que’m demandarí çò qu’ei un programa d’esquèrra.

Je m’interrogerais sur toutes les erreurs faites par des gouvernements et leaders de gauche depuis des années, entrainant certains électeurs de gauche à se retrouver aujourd’hui à l’extrême droite.

Que m’interrogarí a prepaus de totas las errors hèitas peus govèrns e capdaus d’esquèrra desempuish annadas e qui an aviat quauques electors d’esquèrra a’s trobar uei a l’extrèma dreta. 

J’arrêterais de vouloir parler comme la droite pour espérer ratisser large.

Que deisharí de voler parlar com la dreta entà esperar arrasterar mei

Je m’interrogerais sur l’élection d’un président qui n’a plus de contrepouvoir pour s’opposer à lui.

Que’m pausarí questions sus l’eleccion d’un president qui n’a pas mei nat contrapoder tà s’opausar.

Je me rendrais compte que même aux Etats-Unis le président n’a pas autant de pouvoir que chez nous.

Que m’avisarí que quitament aus Estats-Units lo president n’a pas tantes poders com a noste.

Je m’interrogerais sur le culte de la personnalité qui peu à peu devient la norme.

Que m’interrogarí a prepaus deu culte de la personalitat qui pauc a pauc e’s càmbia en la nòrma.

Je me demanderais s’il est bien sain que le nom du président et son prénom soient cités à longueur de journaux radio, télé et presse écrite. Comptez vous verrez.

Que’m demandarí s’ei plan sanitós en democracia que lo nom deu president e lo son prenom sian citats a longor de jornaus, radio, tele e premsa escriuta. Comptatz, que vederatz.

Je me demanderais s’il est bien utile qu’un président de la République ait une opinion sur tout et qu’il l’exprime.

Que’m demandarí s’ei plan utile en democracia qu’un president de la Republica agi ua opinion sus tot e que l’exprimi.

Je me demanderais si écrire au président de la République (ou à son épouse) chaque fois qu’on a des doléances est vraiment un réflexe républicain.

Que’m demandarí se d’escríver au president de la Republica (o a la soa molhèr) cada còp qu’òm a quauques doléncias ei un reflèxe vertadèrament republican.

Je m’interrogerais sur la démocratie.

Que m’interrogarí sus la democracia.

Je me demanderais si c’est ce prétendu lien personnel entre un peuple et un homme ou une femme, ou si ce ne serait pas plutôt un parlement avec des pouvoirs, avec en plus de vrais pouvoirs décentralisés qui seraient autant de contrepouvoirs ?

Que’m demandarí s’ei aqueth pretendut ligam personau enter un òmi o ua hemna d’un costat e un pòble de l’aute, o se non seré pas meilèu un parlament dab poders dab, en mei, de vertadèrs poders descentralizats qui serén autant de contrapoders ?

Je m’interrogerais sur cette pathétique bataille de nombrils qui se joue maintenant.

Que m’interrogarí a prepaus d’aquera patetica batalha de melics qui’s jòga adara.

Je me demanderais combien d’entre nous ont le nombril à gauche.   

Que’m pausarí la question de saber quantes de nosautes an lo melic a l’esquèrra.

Je m’interrogerais sur la décentralisation et la possibilité de faire  en sorte que tout ne se décide pas à Paris parmi les quelques milliers de personnes qui se voient comme l’élite de la politique et des médias.

Que’m pausarí questions sus la descentralizacion e la possibilitat de har que tot non sia decidit de París estant, au demiei deus quauques milierats de personas qui creden d’estar l’eleit de la politica e deus mèdias.

Je me demanderais si la démocratie vit bien sur les plateaux de trois ou quatre chaines de télévision et de radio où l’on voit toujours les mêmes poser les mêmes questions aux mêmes candidats ou candidates ou candidats et candidates potentiels.

Que’m demandarí se viu plan la democracia suus platèus de tres o quate canaus de television e de radio, on s’i veden tostemps los medishs a pausar las medishas questions aus medishs candidats, candidatas, o candidats e candidatas potenciaus.

Je me demanderais si la démocratie parlementaire ne serait pas une bonne solution, finalement.

Que’m demandarí se la democracia parlamentària non seré pas ua bona solucion, tot compte hèit.

Je me demanderais comment font ceux qui font vivre la démocratie sans président omnipotent.

Que’m demandarí quin hèn los qui n’an pas de president omnipotent entà har víver la democracia.

Je me demanderais pourquoi je parle si peu d’Europe.

Que’m demandarí perqué parli tan pauc d’Euròpa.

Je me mordrais les doigts d’avoir créé le président sortant.

Que me’n saberé mau d’aver creat lo president sortent.

Si j’étais la gauche, je crois que je choisirais de faire campagne pour une sixième République et une nouvelle constitution.

Estossi l’esquèrra, que credi que causirí de har campanha per ua sheisau Republica e ua navèra constitucion.
Si j’étais la gauche je ferais cela en étant cohérent.

Estossi l’esquèrra que harí  aquò en tot estar coerent.

Si j’étais la gauche je n’irais pas à une élection qui ne vous apprend qu’à dire JE et jamais NOUS.

Estossi l’esquèrra, n’anarí pas a ua eleccion qui vos ensenha sonque a díser JO e jamei NOS.

Si j’étais la gauche, je me souviendrais de 1969 et de son élection présidentielle où la gauche fut…ce qu’elle risque d’être au mois d’avril prochain.

Estossi l’esquèrra, qu’averí en cap lo sovier de 1969 e de l’eleccion presidenciau quan l’esquèrra estó…çò qui poderé estar au mes d’abriu qui vien.

Si j’étais la gauche, et que j’étais cohérent, je refuserais cette dérive institutionnelle et non démocratique et JE NE PRESENTERAIS PAS DE CANDIDAT À CETTE ÉLECTION.

Estossi l’esquèrra e estossi coerent qu’arrefusarí aquera deriva institucionau e non democratica e NON PRESENTARÍ PAS NAT CANDIDAT A AQUESTA ELECCION.

Si j’étais la gauche je ferais de ce refus un acte politique, un programme.

Estossi l’esquèrra que harí d’aqueth arrefús un acte politic, un programa.

Mais je ne suis pas LA GAUCHE… J’essaye juste de faire quelques phrases cohérentes.

Mes non soi pas L’ESQUÈRRA… qu’essagi sonque de har quauques frasas coerentas

David Grosclaude

La presse, les médias : en France ils sont concentrés et centralisés.

Dénoncer la concentration des moyens d’informer entre les mains d’une poignée de propriétaires est indispensable ; mais le centralisme des médias est lui aussi tout aussi nuisible au pluralisme de l’information.

250 journalistes et professionnels de la presse dénoncent dans une tribune (*) la concentration des moyens d’informer (presse écrite, radios, télévisions, numérique…) en France entre les mains de quelques rares personnes, de quelques grandes fortunes.

C’est un sujet important et il n’échappe à personne que c’est un enjeu majeur dans une démocratie. Le droit d’informer et d’être informé de façon équilibrée et juste ainsi que de bénéficier d’une information vérifiée est indispensable en démocratie.

photo Ravzan Socol wikimédias Commons

Le droit de disposer d’une information pluraliste est donc sans aucun doute menacé par la concentration des moyens d’informer entre un petit nombre de mains.

Le journaliste que j’ai été pendant de longues années ne peut que soutenir cette tribune. Cependant j’aurais aimé que ce texte prenne en compte un autre aspect qui me paraît aussi très dangereux pour le pluralisme de l’information. Je veux parler de la concentration géographique des médias, du centralisme médiatique.

Champions du centralisme médiatique

La France est le champion du centralisme politique mais aussi du centralisme médiatique. Il existe très peu de pays où les médias sont concentrés sur un espace géographique aussi réduit. Tout ou presque se trouve à Paris et chaque année la presse dite régionale perd en puissance.

Quant à l’audiovisuel régional (télévisions et radios) il est quasiment inexistant, en tous cas quand il existe, c’est toujours à Paris que se trouve le centre de décision.

La France n’a pas su, ou n’a pas voulu, créer de véritables télévisions régionales de plein exercice. Pas de télévisions hors Paris qui regardent le monde ! L’audiovisuel régional se réduit à n’être qu’une succursale.

Le pluralisme malade du centralisme

La presse quotidienne régionale souffre comme le reste des médias du phénomène de concentration et en plus elle doit vivre dans une ambiance qui fait d’elle une presse subalterne, une presse qui n’est là que pour faire du « régional » et non pour expliquer et regarder le monde. Il faut s’interroger sur les expressions « presse régionale » et « presse nationale ». Il y a de la condescendance dans ces mots. Il est un temps d’ailleurs où pour accéder à la tribune de presse de l’Assemblée Nationale il y avait deux portes : une pour la presse nationale et une autre pour la régionale. C’était écrit ainsi. Curieuse discrimination mais très évocatrice.

Pourtant en Europe les pays où de très grands journaux dits « de référence » ne sont pas dans la capitale politique sont majoritaires (Allemagne, Espagne, Italie…).

Le même constat est à faire pour les télévisions, les radios.

Alors, me direz-vous, quel rapport entre la démocratie, l’information et ce centralisme des médias ?

C’est très simple. La proximité des mondes politique et médiatique (proximité géographique, sociale, parfois familiale et affective) a des conséquences évidentes, visibles. C’est un petit monde très réduit qui occupe les plateaux de télévision, les studios de radio. Il y a parfois des liaisons, des rapports entre ces mondes qui ne correspondent pas à l’idée que l’on peut se faire de l’indépendance de la parole journalistique. 

Qui diffuse et d’où on parle

Le message que l’on transmet peut dépendre parfois de qui vous paye, qui vous édite, qui vous diffuse mais il peut aussi dépendre d’où vous parlez, d’où vous écrivez. Et je fais partie de ceux qui pensent que l’on n’informe pas de la même façon quand on est à Toulouse, Paris, Bordeaux, Barcelone, Munich…Le point de vue n’a d’intérêt que quand il y a DES points de vue, des lieux d’où l’on voit et depuis lesquels on comprend le monde.

La caricature est alors à son comble avec l’élection présidentielle qui s’annonce. Des candidates et des candidats sortis du centre (une présidente de la région, une maire de Paris, un chroniqueur que l’on qualifie de polémiste…) et de ses médias saturent l’espace médiatique. Et ce sont les médias situés sur le kilomètre carré ( ou peut-être deux kilomètres carrés) autour de la Tour Eiffel qui font et défont les débats, les candidats, les sujets qu’il faut commenter.

Le conformisme ennemi du pluralisme

Alors certain diront peut-être que cela n’empêche pas le pluralisme. Je ne le crois pas. Je crois en revanche que cela crée de l’uniformisme, (terme que j’emprunte à dessein à la géologie), pour ne pas dire du conformisme.

Qui pourrait contester le fait que de découper le monde en deux, c’est à dire Paris d’une part et la Province de l’autre, n’aurait pas d’influence sur le message, sa forme, son objectif ? Même si ce sont des mécanismes inconscients ce sont des mécanismes qui jouent un rôle.

La tribune dont je parlais au début, publiée par 250 professionnels des médias dit ceci :  « Bien sûr, les journalistes qui travaillent pour les médias détenus par ces industriels ne subissent pas directement et au quotidien la pression de leurs actionnaires. » J’adhère à cette vision des choses. Je ne crois pas aux journalistes « vendus »  comme certains les dénoncent. La très grande majorité fait son métier en conscience, avec sa culture, ses idées, ses convictions. Mais les mécanismes d’influence sont plus subtils que cela n’y paraît, c’est bien connu ; et pour cette raison les auteurs de la tribune ajoutent avec justesse : « Mais la concentration a un impact majeur sur la qualité et la diversité de l’information délivrée au public. Elle réduit l’espace consacré au décryptage. Elle favorise l’opinion et fragilise la liberté de la presse ainsi que l’indépendance des journalistes ».

Je ne dis rien d’autre concernant la concentration géographique des médias et le centralisme médiatique qui règne en France. Je pourrais paraphraser le texte de la tribune en disant que : « la centralisation a  un impact majeur sur la qualité et la diversité de l’information ».

David Grosclaude

« L’hyperconcentration des médias est un fléau médiatique, social et démocratique » tribune publiée par le journal Le Monde du 15 décembre