Trois naufrages démocratiques : régionales, Espagne, Conseil Constitutionnel

(Article bilingue : version occitane à la suite)

La démocratie vient de perdre quelques vaisseaux de plus, avec trois événements qui se sont déroulés ces jours derniers.

Des élections régionales en France que peut-on en dire ? Hormis le fait que c’est une catastrophe démocratique ? Le vaisseau est au fond de l’eau. La prétendue décentralisation n’existe plus, pour autant qu’elle n’ait jamais existé un jour. Avec une participation ridicule les élections qui se sont déroulées dimanche dernier n’ont pas de grande valeur. Les électeurs ont déqualifié les régions et les départements. Ils disent qu’ils n’y comprennent rien, qu’ils ne savent pas ce que sont les compétences des régions ou ses attributions et que ce ne sont pas des élections intéressantes.

Ils ont raison. Bien que je sois un fervent défenseur de la décentralisation je ne peux pas leur donner tort.

D’abord cela fait des années que l’on n’arrête pas de dire aux électeurs que la seule élection qui vaille est celle du roi, du président de la République.

Puis, en 2015 on a voté une loi qui a retaillé les régions. Nous savions, et nous l’avions dit, que ce serait un désastre : c’en est un, clairement. Et je ne peux pas m’empêcher de penser qu’à la manœuvre il y avait à l’époque un nommé Manuel Valls (il n’était pas seul c’est vrai) qui peu de temps après est parti en Catalogne pour l’aventure que nous connaissons.

La décentralisation est morte et si les électeurs ne comprennent rien aux régions et aux départements, c’est qu’en France on a voulu faire une décentralisation sans goût et sans odeur.

Si on a reproché à Madrid d’avoir fait avec les autonomies du « café para todos » (café pour tous) c’est à dire une tentative de banalisation de l’autonomie régionale pour noyer celle des basques, catalans et galiciens,  chez nous c’est aussi « café pour tous ! » mais décaféiné, avec une petite tasse et sans cuillère.

Nous avons des régions sans pouvoirs, sans identité pour la plupart, sans moyens économiques et budgétaires, sans existence véritable.

Quand il y a un enjeu un peu plus important les électeurs se déplacent ; nous le voyons en Corse où la participation est le double de ce qu’elle est sur le continent.

Quant à ceux qui s’aventurent à tirer des conclusions concernant la baisse du vote d’extrême droite ils devraient être prudents parce que la participation a été si triste qu’il semble risqué de faire des analyses politiques fiables sur une telle base.

La grâce

Naufrage démocratique aussi de l’autre côté des Pyrénées. Pedro Sanchez, le premier ministre espagnol a décidé de gracier les prisonniers catalans, les prisonniers politiques catalans, car ce sont bien des condamnés pour fait politique. Il était certes obligé de le faire parce que le Conseil de l’Europe commençait à montrer du doigt cette Espagne qui met en prison des personnes qui ne sont coupables d’aucune action violente mais qui ont juste permis l’organisation d’un référendum.

Plus de trois ans de prison, après un procès indigne. Certes ce n’était pas Sanchez qui était à la manœuvre le 1er octobre 2017 mais son parti ne fit pas mieux que la droite espagnole à ce moment là.

Maintenant qu’ils sont libres —et il faut s’en réjouir—ces prisonnières et ces prisonniers politiques catalans, il y a des gens à Madrid qui semblent attendre un « merci » de leur part…Au bout de trois ans et demi d’un enfermement injuste ?

Et mieux que cela ! Ils sont menacés de repartir en prison s’ils mènent des actions qui pourraient rentrer dans le cadre des éléments qui les firent condamner. Délit d’opinion ? C’est à peine croyable ! Pourtant les prisonnières et les prisonniers à peine sortis de leur prison n’ont pas laissé la moindre chance à Madrid de se réjouir et ils ont dit que, plus encore qu’avant, leurs convictions étaient fortes pour l’autodétermination et la mise en place d’une république catalane. !

Je comprends bien qu’ils ne disent pas merci. Je ne suis pas catalan et je n’ai pas à dire si je suis pour ou contre l’indépendance, mais ce que je sais c’est qu’il y a encore des gens en exil et que de toute façon la solution est de mettre en place un référendum pour véritablement sortir de la crise. 

Si cela ne se fait pas la démocratie aura fait naufrage. Le vaisseau Espagne risque bien d’être pris d’assaut par une bande de pirates d’extrême droite, nostalgique du franquisme. Ce sont eux qui on tiré le meilleur profit de l’attitude hypernationaliste du tribunal qui a jugé les responsables politiques et associatifs catalans.

La place de Pedro Sanchez est certes très inconfortable. Il hérite d’une situation créée par M.Rajoy, le Parti Populaire et les juges du Tribunal Suprême. Mais il ne pouvait pas ignorer qu’un jour son parti aurait à reprendre le pouvoir à Madrid (il le souhaitait) et il aurait du être plus attentif au respect de certaines règles démocratiques en octobre 2017.  Aujourd’hui voilà qu’il doit choisir par quel bout il doit saisir un bâton bien…merdeux

Conseil Constitutionnel

Cette affaire catalano-espagnole me fait penser à l’attitude du Conseil Constitutionnel français. A peine avait-il terminé de prendre sa décision pour tuer la loi Molac et le vote majoritaire des députés, qu’il a donné des précisions sur sa décision ; elle ne serait pas vraiment ce que nous devions comprendre. L’immersion serait autorisée dans les écoles où elle se fait aujourd’hui. Il serait juste interdit de la pratiquer dans le service public d’éducation. Autant dire que cela nous donnerait le droit de continuer à faire ce que nous voulons tant que cela ne nécessite pas l’utilisation des moyens du service public, qui, ne l’oublions pas, sont aussi les nôtres. Finalement  ils nous demandent de nous réjouir du fait que nous sommes libérés de la menace d’une sanction qui pourrait tomber mais ne tombera pas parce que nous bénéficions d’une certaine grâce, d’une certaine mansuétude…à la condition de nous taire et de ne pas demander plus.

Repentons-nous d’avoir osé penser un moment que la loi pouvait s’appliquer à nous et à nos langues ! Demandons pardon d’avoir imaginé, rêvé qu’une loi de la République adoptée à une très large majorité, pouvait donner à notre langue la place qu’elle mérite dans l’éducation, dans l’école. C’est cela que l’on attend de nous ? Nous ne pouvons pas nous contenter d’une faveur qui consiste à nous dire que nous ne serons pas punis pour avoir cru que la République fonctionnait correctement et qu’elle allait enfin respecter une règle plus importante que l’interprétation étriquée d’un article de la constitution. La loi a été votée à une large majorité et elle donne à notre langue une place que nous revendiquons et qui est légitime.

Cette place nous la voulons dans l’école de service public ou dans les écoles associatives, qui rappelons-le, pallient l’incapacité de l’Education nationale à répondre à une demande. Que l’on enseigne en occitan aux enfants des parents qui le souhaitent doit être possible partout.  

Nous devons nous battre, plus que d’autres pour obtenir des droits élémentaires. C’est cela que le Conseil Constitutionnel nous explique. Il y a visiblement dans la République des citoyens de catégories diverses.

Mans de Breish canta « avèm autant de dreches coma los autres n’an

E qualques uns de mai (…) de far tutu pam pam ». C’est ce que nous dit le Conseil Constitutionnel. Il nous menace d’une sanction si nous voulons rentrer dans la normalité.

Coratge ! Pro d’estar mespresats !

David Grosclaude

Tres naufragis democratics : regionalas francesas, Espanha, Conselh Constitucional

La democracia ven de pèrder qualques vaissèls mai, amb tres eveniments que se debanèron recentament.

De las eleccions regionalas en França que podèm dire, en defòra del fait qu’es una catastròfa democratica ? Lo vaissèl es al fons de l’aiga. La pretenduda descentralizacion existís pas mai, se jamai existiguèt un jorn !

Amb una participacion ridicula las eleccions que se debanèron dimenge passat an pas gaire de valor. Los electors an desqualificat las regions e los departaments. Dison que i comprenon pas res, que ne sabon pas las competéncias o las atribucions. Dison que son pas d’eleccions interessantas.

An rason ! Per èstre un afogat de la descentralizacion, lor pòdi pas dire qu’an tòrt.

Primièr, fa d’annadas qu’òm quita pas dire e de cantar pertot als electors que la sola eleccion que val quicòm, es la del rei, del president de la Republica.

Tanben en 2015 votèron una lei que retalhèt las regions. Sabiam e diguèrem que seriá ua catastròfa : n’es una, clarament. E me pòdi pas empachar de pensar qu’a la manòbra i aguèt un nomat Manuel Valls (èra pas solet, es vertat) que, pauc de temps aprèp, partiguèt a Catalonha per l’aventura que sabèm. Ara se’n torna en cò nòstre en esperant que s’i poirà trobar una plaça. L’ambient es favorable per el, de tota faiçon.

La descentralizacion es mòrta en França e se los electors comprenon pas res a las regions e als departaments es que, en França, an volgut far una descentralizacion sens gost, sens perfum.

I a lo famós « café para todos » de l’Espanha (autonomia per totes dins l’amira de negar l’autonomia basca, catalana e galiciana). En França avèm dret a un « cafè per totes » mas es un descafeïnat, la tassa es pichona e nos manca la culhèra per eventualament esperar de sucre. De regions sens poders, sens identitat, sens mejans economics, sens existéncia vertadièra.

Quand i a un enjòc un pauc mai important, los electors se desplaçan ; o vesèm en Corsega on la participacion es lo doble de la del continent.

E los que s’aventuran a tirar de conclusions sus la baissa del vòte RN deurián èstre prudents que la participacion foguèt tan trista que sembla un pauc riscat de far d’analisis politicasseriosas sus aquela basa.

La gràcia

Naufragi democratic tanben de l’autre costat dels Pirenèus. Pedro Sanchez, lo primièr ministre espanhòl a decidit de graciar los presonièrs catalans, los presonièrs politics catalans. Obligat de o far pr’amor ja lo Conselh de l’Euròpa començava de mostrar del det aquela Espanha que met a la preson de personas qu’an pas agut una sola accion violenta mas qu’an sonque permés l’organizacion d’un referèndum.

Mai de tres ans de preson, aprèp un procès indigne. Segur es pas Sanchez qu’èra a la manòbra lo 1èr d’octobre de 2017 mas son partit faguèt pas melhor que la dreta espanhòla a aquel moment.

Ara que son libres —e se’n cal regaudir— las presonièras e los presonièrs politics catalans, i a de monde a Madrid que voldrián que diguèsson mercés a l’Espanha per los aver liberats…al cap de tres ans e mièg d’un embarrament injuste ?

E mai qu’aquò ! Son menaçats de tornar a la preson se menan d’accions que poirián dintrar dins lo cadre dels elements que los faguèron condamnar. Es pas de creire ! Delicte d’opinion ?

Ça que la, las presonièras e los presonièrs, a la sortida de lors presons an pas daissat la mendra oportunitat a Madrid de se regaudir, e totes diguèron que, mai qu’abans, lor convicion anava cap al dret a l’autodeterminacion e a la constitucion d’una republica catalana. Compreni plan que digan pas mercés.

Soi pas catalan, e ai pas a dire se soi per o contra l’independéncia, mas çò que sabi es que i a encara de monde en exilh e que de tota faiçon la sola solucion demòra de metre en plaça un referèndum per sortir vertadièrament de la crisi. Se aquò se fa pas, non solament la democracia aurà naufragat, mas lo naviri Espanha risca d’èstre assaltat per una banda de piratas d’extrema dreta, nostalgica del franquisme. Son de monde qu’an tirat profièit de l’actitud ipernacionalista del tribunal que jutgèt los presonièrs catalans.

Voldriái pas èstre a la plaça de Pedro Sanchez que, en prenent lo poder, es ara en carga d’una question fòrça complicada. Mas la plaça la voliá !

En tèrmis populars parlan d’un « baston merdós », que li daissèron lo govèrn del Partit Popular, son president Rajoy  e los jutges del Tribunal Suprème. Ara es a el de saber per quin cap lo prendre.

Conselh Constitucional

Aquel afar catalano-espanhòl me fa pensar a l’actitud del Conselh Constitucional francés. A penas acabèt de prendre sa decision per tuar la lei Molac e lo vòte majoritari dels deputats, que donèt una precision ; Çò qu’avèm legit e çò qu’es escriut seriá pas exactament çò que deuriam comprendre. L’immersion seriá autorizada ont se fasiá duscas ara mas seriá pas permés de la practicar dins lo servici public de l’Educacion ! Tant val dire que nos donariá lo dret de contunhar de far çò que volem tant qu’aquò se fa pas amb los mejans de la Republica. Pasmens aqueles mejans son tanben nòstres.

Finalament nos demandan de nos regaudir d’èstre liberats d’una sanccion que poiriá tombar mas que tombarà pas pr’amor nos fan beneficiar d’una mena de «gràcia»…a la condicion de nos calar e de pas demandar mai.

Nos devèm acontentar d’una favor que seriá de nos dire que nos castigaràn pas. Seriam doncas perdonats d’aver pensat un moment, somiat un jorn, de donar a nòstra lenga la plaça que s’amerita dins l’escòla.  Sèm copables d’aver pensat que la lei s’aplicariá a la lenga nòstra coma aquò se fa dins un país de dret.

Aquela plaça dins l’escòla, la volèm, que siá dins l’escòla del servici public o dins las escòlas associativas que elas, dempuèi d’annadas, essajan de compensar l’abséncia de servici public d’educacion en occitan.

Mans de Breish canta « avèm autant de dreches coma los autres n’an

E qualques uns de mai (…) de far tutu pam pam ». Es çò que nos ditz lo Conselh Constitucional. Nos menaçase volèm dintrar dins la normalitat.  

Avèm autant de drets coma los autres …mas sèm obligats de nos batre mai per los far respectar.

Coratge ! Pro d’estar mespresats !

David Grosclaude

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